Après le contenu, les liens-rois ?

par Thomas Fourdin, le 2 mars 2011

Le contenu est désormais considéré à sa juste valeur au centre du dispositif on-line. Mais en revanche, l’hypertextualité fondatrice d’Internet ne semble pas encore complètement maîtrisée [marquez ici une pause respiratoire]. Rédiger et publier les contenus est important mais organiser les parcours de lecture d’un contenu à un autre est pourtant tout aussi crucial.

Dans le cas des sites dits éditoriaux, la capacité à engager l’internaute dans une visite durable est ainsi directement génératrice de résultats. Dans le modèle publicitaire (sites de presse par exemple), le nombre de contenus vus est directement responsable du chiffre d’affaires. Dans le cas de sites de communication institutionnelle ou privée, chaque contenu vu est un temps supplémentaire d’exposition aux messages.

Pourtant je reproche (« j’accuse ! ») aux acteurs internet d’aujourd’hui de ne pas assez se pencher sur l’optimisation de ces parcours de lecture. De ne pas tout mettre en œuvre pour accompagner l’internaute d’un contenu vers un autre dans une progression logique et engageante.

Par exemple je suis toujours surpris de l’approche « brutale » de la majorité sites de presse qui, en marge d’un article, se contentent d’un pavé de liens connexes sans même tenter de préciser les complémentarités entre contenus (formats de contenus, degrés d’actualité, niveau de détail, chronologie, etc.). Une expérience de parcours de lecture qui est pourtant efficacement mise en œuvre à l’unité dans les formats de type webdocu.

Le pavé « à lire aussi » sur le site lefigaro.fr

Dans les métiers du web

On à vu apparaître des responsables éditoriaux chargés du contenu, des trafic managers en quête d’audience, les community managers, etc. Mais à ma connaissance il n’existe pas de visit managers (ou hypernavigation directors, le terme reste à inventer) dont la mission serait de faciliter éditorialement les parcours de lecture et le nombre de contenus vus. Je ne parle pas ici de la conception des gabarits de pages en amont mais bien de la gestion au quotidien des liens entre contenus.

Pour l’exemple, lors de ma mission chez 20minutes.fr (en 2007 déjà) il existait un poste de gestionnaire de la page d’accueil. Sa mission, à l’instar d’un secrétaire de rédaction pour le papier, consistait à optimiser en continu l’organisation des contenus présents en page d’accueil. Ses objectifs étaient de maximiser le nombre de contenus vus depuis cette page en fonction de l’actualité et des attentes des internautes. C’était le seul poste en 2/8 et maintenu le week-end.

Dans les outils de gestion de contenus

Les outils CMS orientent majoritairement leur organisation autour des pages de contenu. La page ou l’article devient l’élément clé. Il n’y est pas possible de renseigner d’un seul tenant un sujet ou un dossier regroupant des contenus de natures différentes. Il reste très complexe de visualiser et d’optimiser un parcours de lecture constitué de plusieurs articles.

À l’inverse, la gestion des liens dans les outils de gestion de contenus est réduite au minimum. Les liens sont gérés comme une surcouche et non comme un élément constituant des contenus. Peu ou pas d’outils sont nativement fournis pour visualiser l’ensemble des liens actifs entre les contenus, les liens morts ou proposer des liens manquants.

Dans la conception des sites

La valeur des architectes de l’information est désormais reconnue mais elle me semble encore trop souvent se réduire à la conception unitaire de la page de contenu, à l’organisation de la page d’accueil et à l’arborescence. La encore, la valeur des liens entre contenus est sous-estimée. Leur expertise devrait pourtant permettre d’optimiser les lectures page à page. Je crois effectivement l’avoir déjà dit.

Dans les outils de suivi

L’analyse des parcours individuels grâce aux web-analytics est un travail très complexe. Il serait pourtant primordial de pouvoir mesurer l’efficacité comparée des parcours de lectures sur un site éditorial. Chaque contenu devrait ainsi pouvoir être évalué dans sa capacité à faciliter la suite de la visite sur le site. Le taux de rebond fait maintenant partie de l’attirail de suivi mais il n’est que la donnée superficielle de cette mesure.

Le pavé &laquo sur le sujet » sur le site liberation.fr

Je ne vais pas le répéter une fois de plus mais il me semble que ce champ de travail est encore très peu arpenté. Est-ce un sentiment partagé ? La maturité dans la gestion des liens entre contenus est elle encore balbutiante ou suis-je déjà un vieux ronchon ?

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